Se passer du gaz ?

par | 1 Mar 2022 | Climat – Environnement

Comme le rappelle une note de l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS) publiée ce matin, la Norvège produit déjà du gaz proche du maximum de sa capacité de production actuelle et les exportations sont limitées par les capacités de transport du gaz, qui dépendent de la taille des gazoducs entre la Norvège et l’Europe. À très court terme, le pays ne sera donc pas en mesure de fournir des approvisionnements supplémentaires significatifs pour compenser une éventuelle baisse des exportations russes.

Coté algérien, la Sonatrach, géant pétrolier public algérien, avait fait savoir au début de l’année vouloir investir 40 milliards de dollars entre 2022 et 2026 dans l’exploration, la production et le raffinage du gaz. Et dans un entretien accordé dimanche au quotidien « Liberté-Algérie », son patron, Toufik Hakkar, s’était dit prêt à fournir davantage de gaz à l’Europe en cas de baisse des exportations russes du fait de la «crise ukrainienne» (pour reprendre le terme utilisé …), en l’acheminant notamment via le gazoduc Transmed, qui relie l’Algérie à l’Italie.

Politiquement, cette déclaration se heurtait aux intérêts de la junte militaire en place à Alger dont Moscou est le principal allié et premier fournisseur d’armement. C’est pourquoi, la Sonatrach a dû très vite publier un démenti sur sa page Facebook officielle, affirmant que le choix du titre de l’interview publiée ce dimanche par Liberté ne reflète pas le contenu de l’interview accordée par son PDG .

A un niveau plus global, à l’issue du sommet de Doha, le 22 février dernier, les membres du Gas Exporting Countries Forum (GECF), qui réunit les pays exportateurs de gaz indiquaient n’avoir que des capacités limitées pour augmenter rapidement l’approvisionnement de l’Europe et ce, sans aucune visibilité sur les prix.

Patrick Pouyanné, le patron de TotalEnergies s’est d’ailleurs exprimé sur le sujet le 24 février, lors du forum de la Fédération nationale des travaux publics (FNTP) : « Pour alimenter l’Europe en gaz, soit on a des tuyaux soit on a des terminaux de regazéification où on amène du gaz naturel liquéfié (GNL). Or ils sont tous pleins en ce moment, et on n’a pas assez de terminaux en Europe pour regazéifier le gaz liquéfié afin de remplacer les 40% de gaz russe, ».

« Il faut 2 à 3 ans pour construire un terminal, la France en ayant déjà, mais pas l’Allemagne » a t’il ajouté.

Pour compléter le propos, il faut rappeler que, au-delà des nouvelles infrastructures physiques à construire au départ, dans le pays producteur, et à l’arrivée, dans le pays importateur, il reste le segment intermédiaire, celui du transport maritime … Or actuellement, le monde manque de navires méthaniers.

On revient à l’approche « systémique » indiquée en avant-propos : si l’on ne peut agir sur l’offre, il faut agir sur la demande.

C’est dans ce contexte que l’Europe va devoir réduire drastiquement sa consommation de gaz et d’électricité, à court terme bien sûr, et très vraisemblablement à moyen-long terme.

Qu’il est déjà loin, le débat sur l’inclusion du gaz dans la taxonomie européenne …

Iconographie : jeune homme lisant à la chandelle, Matthias Stom, peinture à l’huile sur toile, 58,5 cm x 73,5 © Nationalmuseum, Stockholm